Réveillons « l’Ardeur »… de l’Esprit Critique… sur le « coquin » poème « Ah ! vous dirais-je Maman« , attribué à la fille de Mme de Sévigné
Nous recevons, et nous lisons sur la Toile, régulièrement, un « poème coquin » attribué à la fille de Mme de Sévigné… sur lequel, curieux et décodeurs, nous avons tenté de chercher une source sérieuse. Résultat d’une première recherche rapide… et un peu rationaliste.
La seule certitude semble être que ce texte a été chanté par Colette Renard, sur des paroles de Guy Breton et une musique de Raymond Legrand.
Autre lettre contestée. Correspondance. « C’est comme la prétendue lettre à sa fille qui va se marier, dans laquelle madame de Sévigné raconte sa propre nuit de noces en donnant quelques conseils à celle qui est en principe vierge, pour faire jouir son mari et prendre elle même du plaisir (…) » FG, 1.5.16
« Ah ! vous dirais-je Maman »
Poésie attribuée à la Marquise de Grignan, fille de Mme de Sévigné (1660?) dont la provenance est discutée (voir la dernière note de la page, extraite de Wikipédia)
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Ah ! vous dirais-je Maman
A quoi nous passons le temps
Avec mon cousin Eugène ?
Sachez que ce phénomène
Nous a inventé un jeu
Auquel nous jouons tous les deux.
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Il m’emmène dans le bois
Et me dit: « déshabille-toi « .
Quand je suis nue tout entière,
Il me fait coucher par terre,
Et de peur que je n’aie froid
Il vient se coucher sur moi.
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Puis il me dit d’un ton doux :
« Écarte bien tes genoux »
Et la chose va vous faire rire
Il embrasse ma tirelire
Oh ! vous conviendrez Maman
Qu’il a des idées vraiment !
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Puis il sort, je ne sais d’où
Un petit animal très doux,
Une espèce de rat sans pattes
Qu’il me donne et que je flatte.
Oh ! le joli petit rat !
D’ailleurs, il vous le montrera.
Et c’est juste à ce moment
Que le jeu commence vraiment.
Eugène prend sa petite bête
Et la fourre dans une cachette
Qu’il a trouvée, le farceur,
Où vous situez mon honneur.
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Mais ce petit rat curieux,
Très souvent devient furieux.
Voilà qu’il sort et qu’il rentre
Et qu’il me court dans le ventre.
Mon cousin a bien du mal
A calmer son animal.
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Complètement essoufflé,
Il essaye de le rattraper.
Moi je ris à perdre haleine
Devant les efforts d’Eugène.
Si vous étiez là, Maman
Vous ririez pareillement.
Au bout de quelques instants
Le petit rat sort en pleurant.
Alors Eugène qui a la tremblote
Le remet dans sa redingote.
Et puis tous deux, nous rentrons
Sagement à la maison.
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Mon cousin est merveilleux
Il connait des tas de jeux
Demain soir, sur la carpette
Il doit m’apprendre la levrette
Si vraiment c’est amusant
Je vous l’apprendrai en rentrant.
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Voici ma chère Maman
Comment je passe mon temps.
Vous voyez je suis très sage.
Je fuis tous les bavardages
Et j’écoute vos leçons :
Je ne parle pas aux garçons.
Parmi les sources (non directes et peu vérifiables) 1.5.16 :
www.quintonic.fr/groupes/quimper/discussions/poeme-coquin-de-1660
http://reflet85.skyrock.com/2968068335-Poesie-de-la-Marquise-de-Grignan-fille-de-Mme-de-Sevigne.html
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Sources Critiques, (extraites de Wikipédia) 1.5.16 :
« Françoise de Sévigné, http://fr.wikipedia.org/wiki/Françoise_de_Sévigné née à Paris le 10 octobre 1646 et morte le 13 août 1705 à Marseille, dans le quartier de Mazargues, comtesse de Grignan, est la principale destinataire des lettres de sa mère, Madame de Sévigné. Conjoint(e): François Adhémar de Monteil de Grignan Parents: Henri de Sévigné · Marie de Rabutin-Chantal, marquise de Sévigné Enfants: Pauline de Simiane · Marie-Blanche · Louis-Provence (…) »
Discussion sur le poème et sa supposée provenance : https://fr.wikipedia.org/wiki/Discussion:Ah_!_vous_dirai-je,_maman – La version grivoise est-elle vraiment ancienne ? L’article dit : « Une vieille1 version grivoise a été adaptée par Guy Breton (paroles), Raymond Legrand (musique) et Colette Renard (interprétation)2. »
↑ On peut lire une allusion à cette chanson dans Le Journal amusant 1/7/1893, p. 3
↑ Album Chansons gaillardes de la vieille France (1960).
Quelle est l’allusion du Journal amusant à une vieille chanson grivoise ? Ceci, peut-être : « Une carotte, c’est quand je dis à maman que je vais au cours et que je vais me balancer avec mon cousin Eugène » ? La ressemblance me semble bien mince. Dans la chanson grivoise, la fille se confie naïvement à sa mère, ici elle lui ment. D’après une recherche Google, « cousin Eugène » se rencontrait dans le genre vaudevillesque dans les années 1810 et 1820, dans un contexte qui n’a rien à voir avec une parodie de « Ah vous dirai-je maman ». Les 200 premiers résultats d’une recherche Google sur « maman » et « cousin Eugène » ne donnent pas la moindre trace d’un prototype de la version chantée par Colette Renard. Pour moi, le Journal amusant de 1893 ne prouve pas qu’une version grivoise ultérieurement adaptée par Guy Breton ait déjà existé en 1893. On lit sur divers sites Internet que la version grivoise, identique à celle que chantait Colette Renard, est l’œuvre de Mme de Grignan, fille de Mme de Sévigné, mais c’est certainement un bobard : outre que la version originale est du 18e siècle et ne peut donc pas avoir été parodiée au 17e, la langue et surtout la versification de la version chantée par Colette Renard ne sont pas celles du 17e siècle. Même pour le 19e siècle, la versification de la version Colette Renard me semblerait bien relâchée (mais bon, le « vers libre » date des dernières années du 19e siècle, donc je n’insisterais pas là-dessus). Bref, il me semble que rien ne prouve que Guy Breton ait adapté une version grivoise préexistante. Notre article donne un lien vers une version grivoise publiée en 1834 :
Récit naïf d’un enfant rapporteur, Le chansonnier omnibus (Paris, 1834), p. 62, mais cela n’a rien à voir avec la version de Breton. Marvoir (discuter) 14 décembre 2013 à 11:19 (CET). Vous semblez avoir raison; la confusion vient de l’erreur d’attribution de la chanson au mauvais album de Renard; voir http://usdcf.org/wiki/Colette_Renard —Toyotsu (discuter) 14 décembre 2013 à 13:05 (CET)
(ci-dessus, des illustrations de M. Crespin, volontairement un peu décalées)
Premier Commentaire : « C’est comme la prétendue lettre à sa fille qui va se marier, dans laquelle madame de Sévigné raconte sa propre nuit de noces en donnant quelques conseils à celle qui est en principe vierge, pour faire jouir son mari et prendre elle même du plaisir. Elle est fausse et pourtant, circulant dans les cours de lycées, elle a fait bander bien des adolescents et mouiller bien des adolescentes. » FG (11) 1.5.16″
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création, 30.4.16. Remerciements à FG, LP, FR pour leurs infos, correspondances et encouragements.