Le Sénateur Domeizel pratique-t-il le Concordat ?

Tribune Libre. Le sénateur socialiste Claude Domeizel organise une table-ronde sur le « mariage pour tous  » avec les congrégations religieuses dans la salle du conseil de la mairie de Volx (04) !

  • Mariage : Débat Laïque, M. le Sénateur ! Invitation des « Congrégations Religieuses » pour Débattre du « Mariage pour Tous » : Réplique de Laïcité l’Observatoire des AHP et de PACA au Sénateur Domeizel (…). 17.3.13
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Manosque, le 9 mars 2013.

Claude Testanière (04) Manosque

à  Monsieur Claude Domeizel [sénateur des Alpes-de-Haute-Provence]

Objet : Projet de loi « mariage pour tous » 
Référence :  Courrier du 8 mars 2013 CD/SB

Monsieur le Sénateur, mon cher Claude,

J’ai pris connaissance de ton invitation à participer à une table-ronde que tu animeras (es qualité de sénateur de la République) avec les congrégations religieuses départementale et les associations autour du projet de loi « mariage pour tous », le 18 mars prochain.
Tout d’abord je rappelle que, par courrier, en son temps, j’ai porté à ta connaissance mes éléments d’analyse qui fondaient ma position de citoyen sur cette question.

Ils n’ont pas varié et je maintiens mon engagement en faveur du « mariage pour tous ».

Cependant, je suis stupéfait de constater que tu passes par pertes et profits l’Article 1er de la constitution :

« La France est une République indivisible, laïque, démocratique et sociale. Elle assure l’égalité devant la loi de tous les citoyens sans distinction d’origine, de race ou de religion…. »

Et l’Article 3 : « La souveraineté nationale appartient au peuple qui l’exerce par ses représentants et par la voie du référendum. Aucune section du peuple ni aucun individu ne peut s’en attribuer l’exercice. »

Dorénavant, si j’en juge ton invitation, les élus de la République recueilleraient l’avis des congrégations, des communautés… et non plus celui des citoyens libres et égaux en droit et cela même dans la salle du conseil en Mairie de Volx ?

Tu comprendras que je refuse, dans ces conditions, de participer à cette table ronde, car je ne saurais cautionner, par ma présence, une pratique concordataire.

Est-ce que le département des Alpes-de-Haute-Provence est appelé à rejoindre le statut d’exception du concordat d’Alsace-Moselle ?

Rappel Historique sur ce statut d’exception :

Lorsque la loi de 1905 a été promulguée, les départements du Haut-Rhin, du Bas-Rhin (Alsace) et de la Moselle (Lorraine)  étaient annexés par l’Allemagne.

Depuis la récupération de ces régions, celles-ci sont restées sous le régime de la loi du 18 Germinal an X, comprenant la loi du Concordat de 1801.

Les notions de “sphère publique” et de “sphère privée” sont établies dans la loi de 1905 de séparation des Églises et de l’Etat.
Article 1 : “La République assure la liberté de conscience et garantit la liberté des cultes.”
Article 2 : “La République ne reconnaît, ne salarie, ni ne subventionne aucun culte.”

C’est bien la République qui est laïque. En conséquence tous les pouvoirs publics doivent respecter le principe de laïcité, fondé sur trois exigences indissociables : liberté de conscience, égalité de tous les citoyens, visée de l’intérêt général, héritées de la Déclaration des Droits de l’Homme et du Citoyen du 26 Août 1789.

Comme la Déclaration des Droits de l’Homme de 1789, la loi de 1905 fait partie du bloc constitutionnel.

Tu sais bien que d’un côté, il y a ceux qui revendiquent le maintien du statut cultuel d’exception d’Alsace Moselle, contre les principes inclus dans la loi de 1905, et notamment son titre premier.

Leur modèle est le Concordat : des ministres du culte payés avec l’argent de tous, (ces rémunérations représentent 58 millions d’euros), des exonérations fiscales comme personne d’autre ne peut en bénéficier, un accès sans limite aux fonds des communes par l’obligation qui leur est faite de combler les déficits des associations religieuses…

Pour eux, l’Acte III de la décentralisation et les expérimentations qu’il permet sont une aubaine pour sortir des contraintes imposées par la République une et indivisible et ouvrir la voie à toutes les exceptions, qui en l’occurrence, seraient tellement nombreuses, qu’il en serait fini de la règle commune au lieu de la renforcer. C’est ainsi que l’on voit poindre de nouvelles relations établies entre les cultes et les autorités publiques, instaurant de véritables territoires concordataires dans certaines communes (Argenteuil dans le Val d’Oise créée un « Conseil des Cultes » !). A quand le tour de Volx ?

C’est ainsi qu’il y a un projet d’instaurer un Conseil d’Alsace, issu de la fusion des trois collectivités territoriales (Région et départements du Bas-Rhin et du Haut-Rhin) ayant le pouvoir d’adapter localement la norme…

Au bout, la fin de l’égalité républicaine et les détournements massifs de fonds publics vers les religions qui n’hésitent plus à battre le pavé pour tenter d’imposer leurs vues à l’ensemble de la société.

De l’autre côté, il y a ceux qui défendent l’égalité des citoyens, des services publics neutres parce que conformes à la loi républicaine du 9 décembre 1905 séparant églises et état, garantissant la liberté de conscience qui est la liberté de croire ou de ne pas croire. Ils demandent que l’Etat reste neutre en matière religieuse, c’est à dire non partisan, exigeant notamment la fin du financement public des activités religieuses, que les fonds publics soient exclusivement réservés à l’école publique et que soit mis fin au financement des écoles confessionnelles par l’abrogation des lois anti-laïques (loi Debré, loi Carle…).

De quel côté es-tu ? Avant de répondre, souviens-toi d’André Ailhaud de Volx, de Victor Hugo, de Jean Jaurès et de leurs prises de position, qui j’espère, t’inspirent encore.

Je te prie de croire à mon attachement à la République et à la Laïcité.

Claude Testanière